Les feuilles, broyées, triturées, malaxées se trouvaient réduites en une bouillie épaisse qui macérait deux ou trois jours, repassait sous la
meule avant d'être formée en boulettes ou en galettes d'une à trois livres selon les régions.
Ces coques, cocagnes en Lanquedoc, ou tourtel de waide en pays picard étaient entreposées sur des claies, en un lieu aéré : le clédat. Une première fermentation
se produit alors pendant un mois et demi à deux mois puis la coque se déssèche lentement.
Sèche elle peut être vendue et expédiée en l'état ou traitée sur place.
Le second traitement, plusieurs mois plus tard, consiste à réduire en poudre les galettes, puis en rajoutant de l'eau à provoquer une deuxième fermentation, et
une oxydation obtenue par l'ajout de purin, voire d'urine humaine. Il faut brasser régulièrement ce jus noirâtre pour l'homogénéiser et contrôler la fermentation
qui ne doit pas trop chauffer et va durer plusieurs semaines. Les exhalaisons sont alors particulièrement fétides.
Nouveau séchage pour obtenir des sortes de granulés noirs : l'agranat, commercialisé en balles, destiné aux teinturiers.
Moulin du pastelier :
La confusion est possible. L'opération évoquée ci-dessus nécessite un moulin qui va hacher menu des feuilles encore riches en eau, on pourra d'ailleurs en
rajouter au besoin. Si le moulin est limité à cette fonction, une meule en bois, lestée, peut suffire.
Pour la pulvérisation des coques sèches. Seule une meule de pierre, lourde, peut être efficace, donc un autre moulin. En Languedoc les cocagnes étaient
commercialisées en l'état. Elles étaient moulues ailleurs.
Dans d'autres régions, tout se faisait au même endroit, dans le même moulin. Pour la premiére opération, la meule, une roue de pierre d'environ 2 tonnes,
était garnie de couteaux de frêne, les taxons qui étaient ôtés pour la seconde.
Certaines roues de pierre sont encore visibles, alors que des documents notariés font état de roue en bois. Confusion.
Un homme se tenait autour de l'auge pour répartir les feuilles. On comprend qu'un moulin mécanique, à vent ou hydraulique aurait été trop dangereux, et parfois trop rapide.
De plus l'effort à fournir est faible : à vide un homme pouvait faire tourner la meule.
Donc propulsion animale.
L'auge et la meule pouvaient être, dans certains moulins, repoussées à l'étage, le meunier n'étant alors plus géné par le mulet.
Une formule élégante aurait été le double moulin sur deux étages, roue en bois -moins lourde- en haut, avec les claies pour le sèchage. Il n'y aurait que les feuilles à
monter. Une meule en pierre au rez-de-chaussé, et une goulotte pour jeter directement les coques sèches en bas sous la meule*.