ANNEXES
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Règlement du 15 Janvier 1737 Pour la Teinture des Etoffes de Laine, et des Laines servant à leur fabrication.
ARTICLE PREMIER.
LES Teinturiers en étoffes de laine, ou en laines servant à la fabrication des dites étoffes, demeureront separez en deux communautez differentes ; dont l'une ne sera composée que de teinturiers du grand et bon teint, et l'autre de teinturiers du petit teint : et au cas que dans quelques Villes du Royaume, cette distinction n'ait pas été précedemment faite, veut et ordonne Sa Majesté qu'elle soit faite immediatement après la publication du present reglement, et de la maniere suivante.
ARTICLE II.
POUR parvenir à cette distinction, le Juge de police des lieux où elle n'a pas été faite, choisira entre les plus experimentez des teinturiers, ceux qui sont plus capables de faire le grand et bon teint ; à la charge par eux de renoncer expressement au petit teint, et de faire le chef-d'oeuvre du grand et bon teint, tel qu'il est prescrit par l'Article XCI du present reglement, au cas que lors de leur reception à la maitrise, ils n'eussent fait que le chef d'oeuvre du petit teint.
ARTICLE III.
PERMET Sa Majesté, lorsque la distinction des communautez du grand et du petit teint aura été executée, à ceux des teinturiers du petit teint qui voudront passer dans la communauté du grand teint, de s'y faire recevoir ; à la charge néanmoins d'en faire, par devant le Juge de Police, leur declaration, qu'ils seront tenus de faire signifier aux deux communautez, et de faire le chef-d'oeuvre du grand et bon teint, ordonné par l'Article XCI et ce seulement dans l'espace de deux années, à compter du jour de la publication du present reglement : et que les teinturiers du grand et bon teint, qui desireront de passer dans la communauté du petit teint, y soient admis, en faisant une semblable declaration.
ARTICLE IV.
ET Sa Majesté étant informée qu'il y a quelques Villes du Royaume où les teinturiers du grand et bon teint, et ceux du petit teint, ne composent qu'une même communauté, divisée en deux branches, ordonne que cet établissement continuëra de subsister ; pourvû néanmoins que chacune des deux branches ne puisse faire que l'une des deux especes de teinture, soit du grand ou du petit teint, comme si ces deux branches faisoient deux communautez distinctes et separées.
ARTICLE V.
LES teinturiers du grand et bon teint pourront seuls, et à l'exclusion de tous autres, teindre les draps et autres étoffes ayant des lisieres, qui doivent par leur qualité et par leur prix, être teintes de bon teint, suivant les Articles XXIV XXV et XXVI du present reglement ; comme aussi les laines destinées à la fabrication desdites étoffes : et les teinturiers du petit teint teindront aussi seuls en petit teint, et à l'exclusion de tous autres les étoffes de laine de bas prix, et qui ne peuvent être teintes qu'en petit teint, suivant l'Article XXVII du present reglement.
ARTICLE VI.
LES ratines, serges, camelots, estamines, revesches, barracans et autres étoffes semblables, qui par leur qualité, doivent être teintes en bon teint, conformément aux Articles XXV et XXVI pourront être teintes par les teinturiers en soye, laine, fil et coton, concurremment avec les teinturiers du grand et bon teint ; à la charge néanmoins qu'en ce cas, les teinturiers en soye, laine, fil et coton, ne pourront joüir de cette faculté, qu'en renonçant, dans la forme cy devant ordonnée, à la teinture de la soye, de la laine filée, et du fil et coton : et après ladite renonciation, leur fait Sa Majesté très expresses inhibitions et deffenses, à peine de cinq cens livres d'amende, d'avoir dans leurs magasins et boutiques, aucuns ingrediens du petit teint ; et tant à eux, qu'à tous les teinturiers du grand et bon teint, de reteindre aucunes vieilles étoffes et hardes, qu'en grand et bon teint.
ARTICLE VII.
VEUT Sa Majesté qu'en consequence de ladite renonciation, lesdits teinturiers en soye, laine, fil et coton, forment à l'avenir une quatriéme branche, distincte et separée des trois autres, pour ne composer ensemble qu'une seule et même communauté : Leur permet néanmoins Sa Majesté, nonobstant ladite renonciation, de pouvoir dans l'espace de deux années, à compter du jour de la publication du present reglement, retourner dans celle des branches qu'ils auront quittée, en faisant pour cet effet les declarations requises et nécessaires.
ARTICLE VIII.
DEFFEND Sa Majesté à tout teinturier qui aura opté pour le grand et bon teint, sous peine de cinq cens livres d'amende, et d'interdiction de la maistrise pour toûjours, d'avoir dans le lieu de son établissement, ou autres lieux, aucun ouvroir ou boutique où il fasse travailler en petit teint : faisant pareillement Sa Majesté deffenses, sous les mêmes peines, aux teinturiers du petit teint, de faire en aucun lieu travailler en grand et bon teint.
ARTICLE IX.
VEUT Sa Majesté que tous entrepreneurs de manufactures, ou maistres fabriquans, ausquels il est permis de faire teindre dans leur maison, les draps et étoffes par eux fabriquées, et matieres servant à la fabrication d'icelles, se conforment aux dispositions du present reglement ; et que ceux dont les étoffes doivent être teintes en bon teint, n'ayent que la faculté de teindre en grand et bon teint ; et que ceux au contraire dont les étoffes, par leurs qualitez, sont destinées au petit teint, ne puissent teindre qu'en petit teint ; et ce, à peine de cinq cens livres d'amende, et de privation perpetuelle de ladite faculté.
ARTICLE X.
EN cas que dans les étoffes de meslange, il puisse entrer des couleurs et nuances non specifiées dans le present reglement, veut Sa Majesté que toutes lesdites couleurs et nuances soient indistinctement faites avec les ingrediens servant au grand et bon teint seulement : Et pour ôter aux fabriquans tout prétexte d'avoir chez eux aucun bois d'inde, de bresil, et autres ingrediens deffendus par les Articles XIX et XXIII du present reglement, veut et entend Sa Majesté que les lisieres de tous les draps, tant fins que communs, soient teintes en bon teint.
ARTICLE XI.
PERMET néanmoins Sa Majesté à ceux des fabriquans qui ne font que des draps noirs, d'avoir chez eux du bois d'inde, conformément à l'Article LIV du present reglement : voulant Sa Majesté que ceux des fabriquans d'étoffes de couleur, qui voudront les faire teindre en noir, soient tenus de se servir des teinturiers ordinaires du petit teint, pour les noircir et achever ; et au cas que quelques-uns desdits fabriquans fissent une quantité considerable, tant de draps noirs, que de draps de couleur, ils ne pourront néantmoins se servir de bois d'inde, sans une permission expresse de Sa Majesté.
ARTICLE XII.
PERMET Sa Majesté aux Marchands-magasiniers de la Ville de Lille, qui sont dans l'usage, et authorisez à teindre en écarlatte, de continuer ladite teinture seulement, et concurremment avec les teinturiers du grand et bon teint de ladite Ville ; à la charge néanmoins que les Gardes et Egards des teinturiers de ladite Ville, pourront faire le déboüilli des écarlattes teintes par lesdits Marchands-magasiniers, et les dénoncer au Juge des manufactures, en cas de contravention.
ARTICLE XIII.
VEUT Sa Majesté, pour entretenir l'ordre et la discipline dans les communautez des teinturiers du grand et dupetit teint, que dans les Villes où il y aura plus de vingt teinturiers, il soit en la forme ordinaire, à commencer au premier Decembre de la presente année, depuis le dit jour jusqu'au six du même mois, procedé à l'élection de quatre Gardes, dont deux seront tirez de la communauté des teinturiers du grand teint, et deux de la communauté de ceux du petit teint, pour exercer leurs fonctions pendant deux années ; après néanmoins avoir prêté le serment ordinaire par devant le Juge de Police du lieu de leur demeure.
ARTICLE XIV.
ORDONNE Sa Majesté que deux des quatre Gardes qui auront été élûs conformément à l'Article cy-dessus, sçavoir, un de la communauté du grand teint, et un de celle du petit teint, sortiront d'exercice à la fin de chaque année ; et qu'ils seront remplacez par deux autres teinturiers tirez de chacune desdites deux communautez, élûs en la forme cy-dessus prescrite, pour exercer les fonctions de Gardes avec les deux anciens, lesquels seront, à la fin de la seconde année, remplacez successivement par deux sujets tirez de chacune desdites deux communautez : ce qui sera observé d'année en année, en sorte qu'il y ait toûjours deux anciens, et deux nouveaux Gardes.
ARTICLE XV.
DANS les Villes où il y aura moins de vingt teinturiers, il sera seulement élû deux Gardes au lieu de quatre, sçavoir, un Garde du grand et bon teint, et un Garde du petit teint : et après une année d'exercice, l'un desdits deux Gardes en sortira, et sera remplacé par un sujet tiré de la même communauté, pour continuer les fonctions de Garde avec l'ancien, auquel succedera à la fin de la seconde année, un teinturier tiré de sa communauté : et le même ordre sera suivi d'année en année. Voulant au surplus Sa Majesté que ce qui est prescrit par l'Article cy-dessus, tant pour l'élection, que pour la prestation de serment des quatre Gardes, soit observé dans les Villes où il n'y en aura que deux.
ARTICLE XVI.
SERONT tenus lesdits Gardes de faire au moins quatre fois l'année, et plus souvent s'il est jugé nécessaire, des visites exactes chez les maistres des dites deux communautez, pour reconnoistre s'ils se conforment aux dispositions du present reglement ; et en cas qu'il se trouvât des marchandises teintes en contravention, ou des ingrediens deffendus, ils les saisiront ou feront saisir à leur requeste, et en poursuivront la confiscation avec l'amende, pardevant les Juges des manufactures.
ARTICLE XVII.
ENJOINT Sa Majesté aux Gardes-jurez des teinturiers ; d'exprimer dans leurs Procès-verbaux des saisies qu'ils auront faites, les motifs qui y auront donné lieu.
ARTICLE XVIII.
DEFFEND Sa Majesté au tenturiers du grand et du petit-teint de loger dans une même maison : et aux teinturiers du petit teint, d'avoir chez eux des cuves de bois pour le guesde, à peine de cinq cens livres d'amende, et d'interdiction de la maistrise pendant six mois : leur permettant seulement d'avoir des chaudieres de cuivre, suivant l'ancien usage, et des cuves, ou tonnes, pour conserver le brou de noix.
ARTICLE XIX.
FAIT Sa Majesté très expresses inhibitions et deffenses aux teinturiers du grand et bon teint, de teindre, sous quelque prétexte que ce soit, en petit teint, ni de tenir dans leur maison, magasins ou boutiques, aucuns autres ingrediens que les suivans, sçavoir, pastel, voüede, graine d'écarlatte ou kermès, cochenille, garence, gaude, sarette, indigo, orcanette, bois jaune, carriatour, genestrolle, fenugrec, brou de noix, racine de noyer, écorce d'aune, noix de galles, fumach, couperose, alun, tartre, cendres gravelées, arsenic, agaric, soude, potasse, chaux, eaux-fortes, sel ammoniac, salpêtre, sel gemme, eaux-sures.
ARTICLE XX.
LES dits teinturiers du grand et bon teint, ne pourront avoir chez eux aucun des ingrediens suivans, sçavoir, bois d'inde ou de campesche, bois de bresil, de Sainte-Marthe, du Japon, de Fernambouc, santal, fustel, ni aucuns bois de teinture, autres que ceux permis par l'Article précedent ; tournesol, terra-merita, orseille, safranbastard, roucou, teinture de bourre, suye, graine d'Avignon ; à peine pour la premiere fois de confiscation desdrogues et de cinq cens livres d'amende, et au cas de recidive, d'interdiction de la maistrise pour toûjours.
ARTICLE XXI.
VEUT Sa Majesté qu'à l'avenir la teinture de bourre ne soit faite que par les teinturiers du petit teint, leur permettant à cet effet d'avoir chez eux de la garence, pour garencer ladite bourre ; sans qu'ils puissent néanmoins employer la garence à aucun autre usage, ni dans aucun autre sorte de teinture, à peine de cinq cens livres d'amende. Permet Sa Majesté aux teinturiers du grand et bon teint, qui sont actuellement dans l'usage de garencer et de fondre la bourre, de passer dans la communauté des teinturiers du petit teint, dans l'espace de six mois, à compter du jour de la publication du present reglement, s'ils veulent continuer le travail de la bourre, auquel cas ils renonceront à toutes les couleurs affectées particulierement au bon teint.
ARTICLE XXII.
LES teinturiers du petit teint ne pourront, sous les mêmes peines, teindre en bon et grand teint, ni tenir chez eux aucuns des ingrediens suivans, sçavoir, pastel, voüede, indigo, cochenille, graine de kermès, garence, sarette, genestrolle, fenugrec, orcanette. Et pour ce qui concerne les autres ingrediens qui ne sont point énoncez au present Article, ni deffendus par l'Article suivant, permet Sa Majesté à tous les teinturiers, tant du grand que du petit teint, d'en avoir dans leur maison, et de s'en servir, comme pouvant lesdits ingrediens être également employez par les uns et les autres desdits teinturiers.
ARTICLE XXIII.
DEFFEND très-expressément Sa Majesté à tous les teinturiers en laine et étoffes de laine, tant du grand que du petit teint, d'avoir en leur maison de la moulée de taillandier ou émouleurs, de la limaille de fer ou de cuivre, ou du vieux fumach, et ce sous les peines portées par l'Article XX se reservant néanmoins Sa Majesté, dans les cas où il seroit jugé nécessaire d'employer quelques-uns des ingrediens dont l'usage est prohibé par les Articles cydessus, ou d'autres dont la propriété auroit été nouvellement reconnuë, d'y pourvoir dans la suite ainsi qu'Elle avisera.
ARTICLE XXIV.
LES draps, ratines, pinchinats, et droguets de toutes especes, dont la couleur est meslée, et les laines destinées pour leur fabrication, seront teintes en bon et grand teint, avant que d'être filées, avec les seuls ingrediens prescrits par l'Article XIX.
ARTICLE XXV.
LES draps blancs de toutes especes, et fabriquez dans toutes les Provinces du Royaume, les ratines, les serges, molletons, camelots, peluches, et toutes autres étoffes de laine, sous quelque nom qu'elles soient connuës et débitées, dont le prix excedera celui de quarante sols l'aune en blanc, seront teintes par le teinturier du grand et bon teint ; sans pouvoir, sous quelque prétexte que ce soit, passer entre les mains du teinturier du petit teint, excepté les étoffes destinées à être mises en noir, et qui auront reçû par le teinturier du grand et bon teint, le pied nécessaire le tout à peine de cinq cens livres d'amende, et, en cas de recidive, d'interdiction de la maistrise pour toûjours.
ARTICLE XXVI.
LES ratines, serges, camelots, estamines, revesches, barracans et autres étoffes semblables, qui n'ont point de lisieres, et dont le prix excede celui de quarante sols l'aune en blanc, seront teintes de bon teint, par les teinturiers du grand et bon teint, concurrement avec ceux des teinturiers en laine, fil et coton, qui auront choisi ce genre de travail conformement à ce qui est prescrit par les articles VI VII et VIII du present reglement.
ARTICLE XXVII.
LES teinturiers du petit teint pourront seuls teindre en petit teint, les serges, estamines, camelots et autres étoffes dont l'aune n'est que du prix de quarante sols et au-dessous, et qui ne sont mises au foulon que pour estre dégraissées et dégorgées : sans néantmoins qu'ils puissent teindre les étoffes drapées, comme les frocs qui se fabriquent à Bolbec, Bernay, Lisieux, Moüy, et autres semblables étoffes, quoyqu'elles n'excedent pas ledit prix ; et qui devant estre foulées, ne pourront estre teintes qu'en grand et bon teint, par les teinturiers du grand et bon teint, ou par les fabriquans qui en ont obtenu la permission.
ARTICLE XXVIII.
LES étoffes énoncées dans les articles cy-dessus, et même les petites étoffes au dessous de quarante sols l'aune en blanc, qu'on voudra faire teindre en bon teint, seront teintes en la maniere prescrite par les articles suivans.
ARTICLE XXIX.
TOUTES les étoffes cy-dessus ne seront mises à la teinture, qu'après avoir été suffisamment dégraissées et dégorgées ; et au cas qu'elles ayent été blanchies avec du soufre ou de la ceruse, qui empeschent la couleur de penetrer, et d'estre unie et égale, elles seront une deuxiéme fois dégorgées. Deffend Sa Majesté, à peine de cinquante livres d'amende, aux teinturiers du grand et bon teint, de recevoir, pour mettre à la teinture, lesdites étoffes, qu'après avoir reconnu que ce que dessus a été exactement observé.
ARTICLE XXX.
DEFFEND pareillement Sa Majesté, sous les mêmes peines, aux dits teinturiers, de mettre en teinture aucunes des étoffes cy-dessus, qui ne soient littées, pour les couleurs qui le doivent estre, conformement à l'article XXXVIII du present reglement.
ARTICLE XXXI.
L'ECARLATE rouge, communement appellée écarlate de Venise, sera teinte avec la graine de Kermès, sans aucun meslange de bresil ; sous les peines portées par l'article XIX.
ARTICLE XXXII.
L'ECARLATE ordinaire, ou couleur de feu, sera teinte de pure cochenille-mesteque, avec eau-forte, sel ammoniac, estain fin, amidon, sans aucun meslange de terra-merita, ni de cochenille-sylvestre.
ARTICLE XXXIII.
LES demi-écarlates ordinaires, ou couleur de feu, seront teintes conformement à l'article cy-dessus, en y adjoûtant la garence ou la cochenille-sylvestre.
ARTICLE XXXIV.
LES demi-écarlates rouges, ou de Venise, seront teintes avec le kermès et la garence, sans aucun meslange de bresil.
ARTICLE XXXV.
LES rouges de garence seront boüillis avec eaux-sûres, alun et tartre, et garencez de garence-grappe, sans meslange de bresil ni autre bois.
ARTICLE XXXVI.
LES cramoisis, après avoir été boüillis avec alun et tartre, seront teints en pure cochenille-mesteque, et rabattus avec un bain de sel ammoniac et de potasse.
ARTICLE XXXVII.
LES violets, pourpres, amarantes, et autres couleurs semblables, seront premierement guesdées, c'est-à-dire, teintes en bleu avec le pastel, le voüede ou l'indigo, et ensuite boüillies en alun et tartre, et passées en cochenille, sans aucun meslange de bois d'inde ni d'orseille.
ARTICLE XXXVIII.
ORDONNE Sa Majesté, sous peine de cent livres d'amende, de litter les violets, pensées et pourpres ; et que le litteau sera mis après que les draps auront été guesdez, pour servir de preuve qu'ils l'ont été également dans toute la longueur de la piece. Permet aussi Sa Majesté de litter les autres couleurs, comme verds, écarlates et autres, lorsque les fabriquans le jugeront à propos pour l'ornement de leurs draps.
ARTICLE XXXIX.
DEFFEND Sa Majesté aux teinturiers du grand et bon teint, de se servir des nacarats de bourre, et des autres couleurs qui se tirent de la bourre garencée, dont Sa Majesté permet l'usage aux seuls teinturiers du petit teint, pour les étoffes du prix de quarante sols l'aune en blanc, et au-dessous ; dérogeant pour cet effet à l'article XXIX des reglemens generaux de 1669 et aux autres articles des reglemens, tant generaux que particuliers, qui permettent d'employer cet ingredien dans le bon teint.
ARTICLE XL.
LES teinturiers du grand et bon teint seront tenus, à peine de cent livres d'amende, de laisser une rose à toutes les étoffes qu'ils teindront des couleurs énoncées dans les articles XXXVII et XXXVIII et de toutes les autres qui doivent recevoir d'abord un pied different de la couleur qu'elles auront après estre achevées : et au cas que la partie de l'étoffe où sera ladite rose, ait reçû un pied different de celuy donné au reste de l'étoffe, le teinturier sera condamné à cinq cens livres d'amende, et deschû de la maistrise, sans pouvoir y estre restabli pour quelque cause que ce soit.
ARTICLE XLI.
Les gris-bruns, minimes, tannez, seront guesdez, boüillis, garencez et brunis. Permet Sa Majesté d'employer à ces sortes de couleurs, la racine de noyer, et les vieux bains de cochenille.
ARTICLE XLII.
Les gris-de-perle, de castor, de souris, et autres gris-clairs, tant des laines que des étoffes, seront faits avec la galle et couperose, et tous autres ingrediens du bon teint, suivant la nuance.
ARTICLE XLIII.
LES couleurs de Roy et de Prince seront guesdées, et ensuite boüillies et garencées, tant en laines qu'en étoffes, et il y sera laissé une rose, pour faire connoistre s'il a été donné un pied de bleu convenable ; sans que, sous les mêmes peines cy-dessus exprimées, le bois d'inde y puisse estre employé.
ARTICLE XLIV.
LES bleus de toutes nuances seront faits de pure cuve de pastel, de voüede ou d'indigo, sans aucun meslange de bois d'inde ni d'orseille.
ARTICLE XLV.
PERMET Sa Majesté aux teinturiers du grand et bon teint, d'employer dans leurs cuves de pastel ou de voüede, la quantité d'indigo qu'ils jugeront à propos, soit en les posant ou en les rechauffant ; dérogeant Sa Majesté à tous reglemens et declarations à ce contraires.
ARTICLE XLVI.
LES verds de toute espece seront littez, si les fabriquans le jugent à propos, conformement à l'article XXXVIII du present reglement ; et les teinturiers seront tenus d'y laisser deux roses à chaque bout, sçavoir, une bleuë et une jaune.
ARTICLE XLVII.
IL est aussi ordonné de laisser deux roses à chaque bout de toutes les étoffes qui seront teintes des couleurs suivantes : Le violet aura une rose du guesde, et l'autre de la cochenille ; le tanné ou amarante, une de bleu, et l'autre de la garence ; le feüille-morte, une de jaune, et l'autre de fauve.
ARTICLE XLVIII.
LES verds de toutes couleurs seront d'abord passez en cuve de pastel, de voüede ou d'indigo, ainsi qu'il est prescrit pour les bleus dans l'article XLIV. Ils seront boüillis ensuite avec alun et tartre, et jaunis avec la gaude, la sarette, la genestrolle, le fenugrec ou le bois jaune, suivant la nuance ; et il est expressement deffendu d'yemployer du bois d'inde, ou aucun autre ingredient de pareille espece.
ARTICLE XLIX.
IL sera permis néantmoins de passer d'abord l'étoffe en gaude, avant que de la mettre en bleu, pour les verds dont la nuance seroit trop difficile à faire autrement, en observant les roses prescrites par l'article cy-dessus.
ARTICLE L.
LES jaunes de toutes nuances, et de toutes couleurs, seront boüillis avec alun et tartre, et teints avec la gaude, la sarette, la genestrolle, le fenugrec, ou le bois jaune.
ARTICLE LI.
LES fauves, ou couleurs de racine, des étoffes dont le prix excedera celuy de quarante sols l'aune en blanc, seront teints par les teinturiers de bon teint ; et ils se serviront de racine de noyer, ou de brou de noix, sanspouvoir y employer de suye, qui ne sera permise que dans le petit teint, et pour les étoffes de bas prix.
ARTICLE LII.
LES étoffes destinées à estre teintes en noir, et qui par leur qualité doivent estre guesdées, seront premierement mises en bleu de cuve ; et après avoir été bien lavées en eau claire, et dégorgées au foulon, seront remises par le teinturier du grand et bon teint, entre les mains du teinturier du petit teint, pour estre noircies et achevées : et le teinturier du petit teint observera, en les noircissant, de laisser à chaque bout de la piece une rose bleuë, pour pouvoir juger si l'étoffe a eu le pied qu'elle doit avoir conformement au present reglement.
ARTICLE LIII.
QUOYQUE par l'article precedent il ne soit point ordonné de garencer les étoffes de laine après qu'elles ont été guesdées, permet néanmoins Sa Majesté de le faire à ceux qui le jugeront le plus convenable, soit pour la beauté, ou pour la bonté de la couleur ; bien entendu que ce ne pourra estre que par le teinturier du grand et bon teint, ou par le fabriquant qui a permission de teindre en bon teint.
ARTICLE LIV.
ANS les Villes où il n'y a pas un nombre suffisant de teinturiers du petit teint, pour noircir les étoffes guesdées ; et où par quelqu'autre raison, il ne sera pas praticable de faire passer les étoffes guesdées, des mains des teinturiers du grand et bon teint, dans celles des teinturiers du petit teint, pour les noircir ; permet Sa Majesté, en ce cas, aux teinturiers du grand et bon teint, d'achever les noirs par eux guesdez, et en consequence, de tenir dans leur maison le bois d'inde ; ce qu'ils ne pourront faire néantmoins qu'après en avoir obtenu de Sa Majesté une permission particuliere : Deffendant Sa Majesté aux teinturiers du bon teint, d'achever les noirs sans cette permission, à peine de cinq cens livres d'amende.
ARTICLE LV.
DEFFEND Sa Majesté à tous les teinturiers, tant du grand que du petit teint, de teindre, sous aucun prétexte, de blanc en noir, aucune étoffe, à peine de cent livres d'amende ; ni de mettre des roses bleuës, sans que le fond ait été guesdé, sous les peines portées par l'article XL du present reglement.
ARTICLE LVI.
LES draps noirs du prix de six livres et au-dessous, n'auront le pied que de bleu-turquin, au lieu du pied de bleu pers que doivent avoir ceux d'un plus haut prix ; et les étoffes de trois livres et au-dessous, pourront ne l'avoir que bleu-celeste : Deffendant très-expressement Sa Majesté, sous les mêmes peines portées par l'article XL. de donner à la rose une couleur plus foncée que celle qui a été donnée au fond de l'étoffe.
ARTICLE LVII.
TOUS les gris, qui sont une nuance dérivée du noir, se feront avec la noix de galle et la couperose ; et lorsqu'ils tireront sur le gris-d'ardoise, gris-lavandé, ou gris de ramier, ils auront un pied de cuve de cochenille, ou de garence, sans qu'il soit permis d'y mesler du bois d'inde.
ARTICLE LVIII.
LORSQU'UNE étoffe de couleur, tachée, flambée, ou autrement gastée, sera destinée à estre mise en noir, elle recevra le pied de guesde par le teinturier du grand et bon teint, qui laissera à chaque bout une rose de la couleur dont elle étoit avant que de la guesder ; et le teinturier du petit teint, à qui l'étoffe sera donnée pour la noircir, sera tenu de conserver ces roses, et d'en laisser deux autres de la couleur qu'avoit l'étoffe en sortant du guesde ; ce qui sera également observé à l'égard des draps appellez vulgairement draps-chats, fabriquez avec les restes des chaisnes et des trames des autres draps de couleur. Enjoint Sa Majesté aux fabriquans qui teindront eux-mêmes leurs étoffes, de se conformer à ce que dessus.
ARTICLE LIX.
PERMET néantmoins Sa Majesté de teindre de blanc en noir à froid, les étamines à voile, et autres petites étoffes qui ne passent point au foulon, après leur avoir donné un bain de racine de noyer, dont il demeurera une rose à chaque bout de l'étoffe, afin de pouvoir juger s'il a été donné d'une hauteur convenable.
ARTICLE LX.
PERMET aussi Sa Majesté aux teinturiers du grand et bon teint, de Reims seulement, de faire concurremment avec les teinturiers du petit teint, les dites teintures de blanc en noir, sur un bain de racine très-foncé, et seulement pour les petites étoffes de la manufacture de Reims, qui ne vont au foulon que pour estre dégraissées et dégorgées.
ARTICLE LXI.
FAIT Sa Majesté très-expresses deffenses de donner aux étoffes dont la chaisne et la trame sont de laine brune, et de toutes autres couleurs, à moins qu'elles ne soient noires, la teinture ou apprest, appellée avivage, qui se fait avec le bois d'inde.
ARTICLE LXII.
VEUT Sa Majesté que tous les draps et étoffes, qui seront teints en bon teint, soit en laine, ou autrement, par les teinturiers, ou par les fabriquans qui ont pouvoir de teindre, soient marquez à chaque bout de la piece, d'un plomb d'un pouce de diametre ; sur l'un des costez duquel sera le nom du teinturier, ou celuy du fabriquant, et celuy du lieu de sa demeure ; et sur l'autre ces mots, GRAND ET BON TEINT ; à peine de confiscation des dites étoffes teintes, trouvées chez les Marchands, ou exposées en vente sans ce plomb, et de cent cinquante livres d'amende pour chaque contravention.
ARTICLE LXIII.
PERMET Sa Majesté aux fabriquans qui teignent leurs laines, draps et étoffes, d'inserer ces mots, GRAND ET BON TEINT, sur leur plomb ordinaire de fabrique, sans en mettre un particulier pour la teinture.
ARTICLE LXIV.
TOUTES les étoffes du prix de quarante sols et au-dessous, en blanc, comme estamines, voiles, sergettes, et autres qui ne vont au foulon que pour estre dégraissées et dégorgées, pourront estres teintes en petit teint, conformement à l'article XXVII. Et afin que le public en ait connoissance, ordonne Sa Majesté qu'il fera mis un plomb de huit lignes de diametre à chaque bout de l'étoffe ; sur un côté duquel sera marqué le nom du teinturier, et celuy du lieu de sa residence ; et sur l'autre ces mots, PETIT TEINT, sous les mêmes peines portées par l'article LXII.
ARTICLE LXV.
PERMET Sa Majesté aux dits maistres-fabriquans, ou teinturiers du grand et bon teint, de teindre en noir, les draps et autres étoffes de laine de couleur, qui auront été tachées, flambées, ou autrement endommagées dans la premiere teinture ; à la charge néanmoins qu'avant que d'estre noircies, elles seront guesdées, et marquées d'un plomb, portant d'un côté le nom du fabriquant ou teinturier, et celuy du lieu de sa demeure, et de l'autre ces mots, ETOFFE RETEINTE EN BON TEINT : et lorsque ce sera un drap-chat, il sera mis sur ce plomb, DRAP-CHAT, Deffendant Sa Majesté à tous teinturiers du grand et bon teint, ou fabriquans, d'y mettre d'autre plomb, à peine de trois cens livres d'amende.
ARTICLE LXVI.
SI quelque piece ayant la marque du grand et bon teint, est, par le déboüilli qui en sera fait, reconnuë estre de petit teint, ou mal teinte, le marchand sur lequel elle aura été saisie et confisquée, aura son recours sur le teinturier ou le fabriquant qui l'aura teinte, tant pour la confiscation, que pour l'amende et les frais ; et au cas que les draps et étoffes ne se trouvent pas munis du plomb de teinture, le marchand supportera la confiscation, l'amende et les frais, sans aucun recours.
ARTICLE LXVII.
ORDONNE Sa Majesté que dans l'espace de six mois, à compter du jour de la publication du present reglement, tous les draps et étoffes qui se trouveront chez les marchands et fabriquans, seront portez au Bureau de Controlle, dans les Villes où il y en a d'establis, et au Bureau de Fabrique, dans les Lieux où il n'y a point de Bureau de Controlle ; pour y être les dits draps et autres étoffes de laine, marquez à la teste et à la queuë, d'un plomb portant d'un costé le nom de la Ville et l'année 1737. et de l'autre ces mots, PLOMB DE GRACE DE TEINTURE.
ARTICLE LXVIII.
VEUT Sa Majesté qu'après l'expiration dudit délay de six mois, les coins qui auront servi à l'empreinte dudit plomb de grace, soient brisez en presence des Juges des Manufactures ; dont il sera dressé des procez-verbaux, pour être par eux directement envoyez aux Sieurs Intendans et Commissaires départis dans les Provinces et Generalitez du Royaume ; et que toutes les pieces de drap et autres étoffes, qui ne se trouveront pas avoir ledit plomb de grace, ou qui ne seront pas teintes conformément au present reglement, soient saisies et confisquées, et les marchands ou fabriquans auxquels elles appartiendront, condamnez en cent livres d'amende pour chaque piece et pour chaque contravention.
ARTICLE LXIX.
Il est expressément deffendu aux teinturiers du petit teint, de mettre aux étoffes par eux teintes, aucunes roses, si ce n'est une rose blanche, ou une du bain de racine de noyer, dans le cas porté par l'article LLX et ce à peine de cinquante livres d'amende.
ARTICLE LXX.
VEUT Sa Majesté qu'après la publication du present reglement, il soit incessamment teint à Paris en presence des gardes-jurez des drapiers, des merciers et des teinturiers, et de telle autre personne qui sera à cet effet commise par Sa Majesté, quatorze eschantillons de draps des couleurs suivantes ; sçavoir, écarlate ordinaire ou couleur de feu, écarlate de graine ou de Venise, rouge de garence, bleu-de-roy, violet, cramoisy, couleur de rose, verd d'émeraude, ardoisé, marron, cannelle, et trois noirs qui auront reçû un pied des trois differens bleus, dont le premier sera pers, le second turquin, et le troisiéme celeste : de tous lesquels eschantillons il sera coupé des morceaux, pour être envoyez dans les Bureaux des Communautez de Teinturiers, établis dans les differentes Villes et Lieux du Royaume où se teignent ces sortes d'étoffes, pour servir de pieces de comparaison et d'eschantillons-matrices, tant pour la beauté que pour la bonté des dites couleurs ; de la remise desquels eschantillons, il sera dressé des procès-verbaux par les Juges des Manufactures, et mention faite sur le Registre desdites Communautés.
ARTICLE LXXI.
VEUT pareillement Sa Majesté qu'il soit teint un eschantillon d'étamine ou autre étoffe semblable, en noir, avec un pied de racine de noyer, pour en être envoyé et déposé, dans la forme cy-dessus prescrite, des morceaux dans les Villes et Lieux où il sera jugé necessaire, pour servir d'eschantillon-matrice, et de piece de comparaison, pour les étoffes qu'il est permis par l'article LIX de teindre de la sorte.
ARTICLE LXXII.
RDONNE Sa Majesté que lors des envois des eschantillons cy-dessus mentionnés, il y sera joint une pareille quantité de morceaux de la même étoffe, qui auront été déboüillis, pour être déposez en meme-temps dans les dits Bureaux, et servir de pieces de comparaison lors des déboüillis qui seront dans la suite ordonnez par les Juges des Manufactures, afin qu'il ne soi t alors necessaire de faire déboüillir des morceaux de l'eschantillon matrice.
ARTICLE LXXIII.
TOUS les eschantillons-matrices, ainsi que les morceaux qui auront été déboüillis, seront marquez d'un plomb, sur un des côtés duquel seront écrits ces mots, ESCHANTILLON-MATRICE ; et sur l'autre, en execution du Reglement de 1737. et chaque eschantillon déboüilli sera marqué d'un numero, semblable à celuy de l'eschantillon-matrice dont il aura été tiré ; desquels plomb et numero il sera fait mention dans le procès-verbal ordonné par l'article LXX cy-dessus.
ARTICLE LXXIV.
LE déboüilli des étoffes de laine mentionnées dans le present Reglement, se fera en la maniere prescrite par l'instruction pour le déboüilli des laines destinées à la fabrique des tapisseries, du 3 Mars 1733 laquelle Sa Majesté veut être executée en son entier ; en observant néanmoins les changemens spécifiez dans les articles suivans.
ARTICLE LXXV.
LES couleurs seront partagées en trois classes, ainsi qu'il est prescrit par l'instruction mentionnée cy-dessus, dont la premiere sera déboüillie avec l'alun de Rome, la seconde avec le savon blanc, et la troisiéme avec le tartre rouge.
ARTICLE LXXVI.
L'ESCHANTILLON de l'étoffe de laine dont sera fait le déboüilli, n'excedera pas la grandeur de deux pouces en quarté, pour la quantité d'eau et d'ingrediens prescrite par la susdite instruction ; et s'il étoit necessaire d'en faire déboüillir de plus grands, ou plusieurs à la fois, le poids de l'eau et des drogues sera augmenté par proportion, conformément à l'article II de ladite instruction.
ARTICLE LXXVII.
TOUTES les couleurs énoncées dans ladite instruction, depuis l'article VII jusques et compris l'article XXXIV seront déboüillies conformément à ce qui y est prescrit, et de la même maniere que les laines destinées à la fabrique des tapisseries.
ARTICLE LXXVIII.
LES étoffes noires seront aussi déboüillies conformément à l'article XXV de ladite instruction, et ensuite confrontées avec les échantillons noirs matrices déboüillis, envoyez de Paris ; sçavoir, les draps de cinq quarts de large, et les étoffes au-dessus de six livres l'aune, seront confrontez avec l'eschantillon qui aura eu pour pied le bleu-pers ; les draps et étoffes au-dessous de six livres jusqu'à trois livres l'aune, et les frocs de Bolbec, de Bernay, et autres de pareille qualité, seront confrontés avec l'échantillon qui aura eu pour pied le bleu-turquin ; et enfin les étoffes du prix de trois livres l'aune et au-dessous, avec l'échantillon qui aura eu pour pied le bleu celeste.
ARTICLE LXXIX.
LES Estamines à voile, et autres petites étoffes qu'il est permis par l'article LIX de teindre de blanc en noir, après leur avoir seulement donné un pied de racine de noyer, seront confrontées, après avoir été déboüillies, avec l'échantillon déboüilli de pareille étoffe, et teint conformément à l'article LXXI.
ARTICLE LXXX.
AU cas que par le déboüilli qui aura été fait des étoffes noires, il se trouve qu'elles ont eu un pied suffisant de bleu, ou de racine de noyer, pour celles portées par l'article LIX mais qu'elles ont été mal noircies, soit pour avoir par le teinturier du petit teint, épargné la noix de galle, ou autrement ; le teinturier qui aura noirci les dites étoffes sera condamné en cinquante livres d'amende pour chaque piece, aux dépens, dommages et interests envers celui à qui appartiendra l'étoffe ; et en outre aux frais pour réamender le noir par un autre teinturier nommé par le Juge.
ARTICLE LXXXI.
SI après le déboüilli d'un drap ou autre étoffe de laine, ordonné par le Juge des manufactures, le teinturier, le marchand ou le fabriquant auquel ladite étoffe appartient, prétendent que ledit déboüilli n'ait pas été bien fait ; permet Sa Majesté aux dits Juges, suivant l'exigence des cas, d'ordonner un second déboüilli de ladite étoffe, conjointement avec un morceau de l'échantillon-matrice de la classe dans laquelle doit être mise l'étoffe, suivant sa valeur et qualité ; pour sur le Procès-verbal dudit second déboüilli, et l'avis des experts nommez, être par les dits Juges statué ce qu'il appartiendra.
ARTICLE LXXXII.
VEUT Sa Majesté qu'il soit observé à l'égard des étoffes qui auront été brunies, ce qui est prescrit par l'Article XXVI de l'instruction; et que ce ne soit pas sur la couleur du bain du déboüilli, que l'on juge de la bonne ou mauvaise teinture de l'étoffe qui aura été brunie, mais sur le pied de couleur qui restera après le déboüilli.
ARTICLE LXXXIII.
TOUTES les amendes qui seront prononcées contre ceux qui auront contrevenu aux dispositions du present reglement, seront applicables, sçavoir, un quart à Sa Majesté, moité aux Gardes qui auront fait faire les saisies, et l'autre quart aux pauvres de l'Hôpital du lieu où les jugemens seront rendus : Enjoint Sa Majesté aux juges des manufactures, et à tous autres juges, de se conformer dans leurs jugemens, aux dispositions du present reglement, et de condamner les contrevenans, aux peines qui y sont exprimées ; sans pouvoir, sous aucun prétexte, les remettre ni les moderer, à peine d'en être responsables en leur propre et privé nom.
ARTICLE LXXXIV.
VEUT et ordonne Sa Majesté que tout ce qui est prescrit et ordonné par le present reglement, soit observé exactement, sous les peines y contenuës, tant par les teinturiers du grand et bon teint et ceux du petit teint, que par les fabriquans qui ont permission de teindre ; dérogeant Sa Majesté, pour ce regard seulement, à tous reglemens generaux et particuliers, qui seront executez en tout ce qu'ils n'ordonnent pas de contraire aux dispositions du present reglement.
ARTICLE LXXXV.
NUL ne sera reçû à la maistrise du grand et bon teint, qu'il n'ait fait apprentissage chez un maistre teinturier en grand et bon teint, et qu'il n'ait demeuré à son service, comme apprentif, l'espace de quatre années, et trois années en qualité de compagnon ; duquel apprentissage il sera passé brevet par devant notaire, qui sera enregistré sur le registre de la communauté.
ARTICLE LXXXVI.
AUCUN maistre ne pourra avoir plus de deux apprentifs à la fois ; et huit jours au plus tard, après les quatre années d'apprentissage, le maistre teinturier du grand et bon teint sera tenu à ses frais, de les faire proceder, en presence det Gardes en exercice, et de deux anciens maistres de la communauté, à une expérience de la teinture, de laquelle il sera dressé procès-verbal signé des assistans et dudit apprentif, s'ils sçavent écrire : et si l'épreuve réussit, l'apprentif sera, en conséquence, enregistré sur le livre des compagnons, dans lequel sera fait mention du dit procès-verbal, et il payera trente sols aux Gardes en exercice : si au contraire l'experience se trouve défectueuse, l'apprentif sera renvoyé chez son maistre, pour y continuer son apprentissage pendant un an ; après lequel, si son experience n'a pas plus de succès, il sera reputé incapable de parvenir au compagnonage : et ne pourront les dits maistres, sous peine de trente livres d'amende, prendre d'autres apprentifs, qu'après que ceux qui auront achevé leur temps sous eux, auront réussi dans ladite experience de teinture, et qu'en consequence ils auront été enregistrez sur le livre des compagnons, ou qu'ils auront été reconnus incapables d'y parvenir.
ARTICLE LXXXVII.
APRES l'expiration des quatre années d'apprentissage pour le petit teint, le maistre de l'apprentif sera tenu de le faire proceder au chef-d'oeuvre prescrit pour le petit teint ; sans qu'il soit tenu de passer par les trois années de compagnonage, ni de faire l'experience de teinture, ainsi qu'il est prescrit par l'article précedent, pour le grand etbon teint.
ARTICLE LXXXVIII.
SI quelque apprentif du grand ou du petit teint, avant la fin de son apprentissage, s'absente de la maison de son maistre, et quitte son service sans cause legitime, jugée telle par le Juge de Police, le maistre le fera sommer de retourner incessamment ; et ce par un acte signifié à cet apprentif, ou au domicile par lui élû, ou à celui de ses parens, ou d'autre personne qui l'auroient cautionné : et faute par l'apprentif d'y satisfaire, le maistre le fera, un mois après ladite sommation, rayer sur le livre de la communauté ; et en consequence, il lui sera permis de prendre un autre apprentif, sauf à celui qui aura quitté son maistre, de s'obliger de nouveau avec un autre maistre, pour servir sous lui pendant quatre années entieres ; sans que le temps que cet apprentif aura servi sous le maistre qu'il aura quitté, puisse lui être compté.
ARTICLE LXXXIX.
AUCUN maistre ne pourra congedier son apprentif, sans cause legitime, jugée telle par le dit Juge de Police ; ni en prendre un autre à la place de celui qui se sera absenté, qu'après l'expiration du dit mois, à peine de trente livres d'amende : et en cas qu'avant ledit terme expiré, il eût pris un autre apprentif, il sera tenu de le renvoyer. Si le Maistre s'absentoit de la Ville de son domicile, ou cessoit son travail, les Gardes seront tenus de donner un autre maistre audit apprentif, un mois après ladite absence, ou cessation de travail, et il lui sera tenu compte du temps qu'il aura servi chez le premier.
ARTICLE XC.
NUL ne sera reçu maistre teinturier du grand et bon teint, qu'il n'ait été apprentif et compagnon pendant l'espace de sept années, chez les maistres du grand et bon teint ; ni maistre teinturier du petit teint, qu'après quatre années d'apprentissage chez un maistre de ladite profession ; qu'il ne soit de bonne vie et moeurs, et n'ait fait chef-d'oeuvre en presence des Gardes en exercice, et de deux anciens maistres de la communauté.
ARTICLE XCI.
LE chef-d'oeuvre que les aspirant à la maistrise du grand et bon teint, de même que les fils de maistres, seront tenus de faire, sera d'asseoir une cuve composée de pastel et d'indigo, ou de voüede et d'indigo ; de mettre cette cuve en état, et d'y teindre en bleu-pers une piece de drap ou de serge ; le tout en presence des Gardes en exercice, et de deux anciens maistres de la communauté, dont il sera dressé Procès-verbal, signé par les assistans et l'aspirant à la maistrise, s'ils sçavent écrire : et la dite piece de drap ou serge s'étant trouvée bien teinte, l'aspirant sera reçû à la maistrise, après avoir prêté serment par devant le Juge de Police, auquel le dit Procès-verbal sera representé ; et les lettres de maistrise lui seront delivrées, en payant les droits accoûtumez. S'il survenoit quelque contestation sur le succès du chef d'oeuvre, la piece teinte en bleu-pers sera portée par devant le dit Juge, pour y être statué ainsi qu'il appartiendra, après une visite préalable du dit chef-d'oeuvre, par expers qu'il aura commis pour cet effet.
ARTICLE XCII.
LE chef-d'oeuvre pour le petit teint, sera de noircir une piece de drap, qui aura précedemment été guesdée par le teinturier du grand et bon teint ; et en outre de teindre deux pieces de petites étoffes, dont le prix n'excedera pas quarante sols par aune, l'une en gris de castor, et l'autre en pourpre, fait avec le bois d'inde et le bresil : et les dites trois pieces ayant été reconnuës bien teintes, il en sera dressé Procès-verbal, et l'aspirant sera reçû à la maistrise du petit teint, en prestant le serment pardevant le Juge de Police, et en payant les droits ordinaires. Les contestations sur la réussite du dit chef-d'oeuvre seront decidées en la maniere prescrite par l'Article XCI du present reglement.
ARTICLE XCIII.
LES chef-d'oeuvres cy-dessus ordonnez, tant pour le grand que pour le petit teint, se feront aux dépens de l'aspirant, chez un des Gardes ou Maistres de la communauté, chez qui il y aura les ustensiles necessaires ; et ledit aspirant fera à ses frais, et en presence des dits Gardes et anciens de la communauté, l'achat des ingrediens dont il entendra se servir, lesquels seront examinez, tant par lesdits Gardes, que par les anciens qui doivent assister au chef-d'oeuvre.
Signé ORRY
Je vous félicite d'être arrivé au bas de cette page et encore plus si vous avez lu soigneusement ce règlement.
Nous sommes ici dans la première moitié du 18ème siècle, sous le règne de Louis XV, âgé de 27 ans, la régence est passée, c'est le ministériat du Cardinal de Fleury. Cinq ans plus tôt, pour clore la crise parlementaire, le roi avait déclaré : " Le pouvoir de faire les lois et de les interpréter est essentiellement et uniquement réservé au roi. Le parlement n'est chargé que de veiller à leur exécution."
Ce texte peut nous faire prendre conscience, qu'ancien régime ou pas, la France a toujours été gouvernée avec soin, par des fonctionnaires compétents ... mais pointilleux !