Il n'est pas question ici, vous l'aviez compris, des peintres en bâtiments, encore que les fresques anciennes et les contemporaines peintures murales à la cire puissent prêter à confusion; pour ne rien dire des tags qui décorent ou avilissent nos rues et parfois nos métros.
Nous pourrons retrouver en peinture les pigments utilisés par les teinturiers, les céramistes ou dans les encres des enlumineurs, des imprimeurs voire des tatoueurs. Arrêtons-nous, juste un instant, sur ceux, d'origine minérale, que l'on trouve dans la peinture des grottes ornées que l'on dit :
Pariétale
Nous allons prochainement parler des grottes ornées qui inaugurent l'histoire de la peinture,
notons que leurs chefs-d'oeuvre sont réalisés avec une palette fort restreinte : du noir, du rouge et quelques ocres.
Le noir provient soit du charbon soit du manganèse.
Le rouge est le plus souvent de l'hématite, un oxyde de fer.
Les bruns sont des mélanges des deux précédents.
Les ocres, des argiles naturellement riches des mêmes pigments.
Peinture
Globalement la peinture est constituée de pigments et de liants. Nous aborderons la question des liants à la page des matériaux. Pour la peinture les pigments se présentent en poudre, * limités au début,
ils se sont multipliés au fil des siècles au point que nous n'essaierons point prétendre à
l'exhaustivité. Procédons par couleurs :
* C'est un pléonasme, les colorants sont solubles, insolubles ce sont des PIGMENTS dans ce cas ils se présentent et restent en poudre.
-- Les bleus
Le bleu égyptien. C'est un verre, broyé, contenant du minerai de cuivre. Il est le 1er pigment synthétique connu !
Le smalt, autre verre, teinté par du cobalt, que les égyptiens réservaient aux émaux et glaçures de céramiques. Le bleu de cobalt actuel, synthétisé au début du 19ème par Thénar l'a remplacé.
L'outremer, lapis-lazuli broyé, son pigment, celui de la lazurite, synthétisé, est devenu le bleu Guimet.
Le céruléum, bleu ciel, oxyde d'étain et de cobalt, qui malheureusement vieillit mal, il verdit. Depuis quelques années nos chimistes mettent au point des bleus de manganèse qui pour certains ont déjà pris sa place.
Le bleu de Prusse, synthétisé par hasard, bleu foncé, est un composé de cyanure et de fer que vous consommerez largement après la prochaine guerre nucléaire (c'est un antidote des retombées radioactives). Si les verts allemands étaient bleus l'Allemagne brûlerait moins de charbon !
-- Les rouges
Le rouge cochenille que nous connaissons déjà.
Le cinabre et le vermillon, sulfures de mercure, naturel pour l'un synthétique pour l'autre, beau rouge qui fonce, hélas, à la lumière. Il traitait la syphilis de Casanova, promettait longue vie aux alchimistes avec lequel ceux-ci croyaient tenir la pierre philosophale.
Aussi toxique le minium, oxyde de plomb, son rouge orangé peut également noircir. Ou blanchir !
C'est lui qui protège de la rouille notre Tour Eiffel depuis 1889.
La sinopie une terre rouge d'oxydes ferreux largement employée pour la peinture à "fresca". Ce n'est en vérité qu'une variété d'ocre rouge.
La laque d'alizarine est une version contemporaine de la laque de garance. Une évidence pour vous qui avez lu la page précédente.
-- Les jaunes
L'orpiment, un minéral cristallisé, riche en arsenic, qui comme son nom l'indique pigmente en jaune d'or.
Nettement moins toxique, préférez donc le bon viel ocre jaune que l'on trouve chez nous, si vous préparez bien votre support vos oeuvres seront toujours aussi belles dans 15000ans, si l'on se réfère à Lascaux par exemple. Notons cependant qu'il existe aujourd'hui des ocres de synthèse qui vont du jaune au brun en passant par le rouge, ce sont les "couleurs de Mars", oxydes de fer **.
le jaune de chrome, superbe mais qui noirçit peu à peu. Les tournesols de Van Gogh finiront-ils en dahlias noirs ?
** Mars pour le dieu de la guerre (le fer de ses armes), ou Mars pour la planète et ses couleurs si bien décrites par Ray Bradbury dans ses Chroniques martiennes.
-- Les noirs
Noir d'ivoire qui n'est plus obtenu en calcinant de l'ivoire mais de l'os. C'est essentiellement du carbone.
Fusain, charbon de bois, c'est aussi du carbone.
Graphite, minéral naturel qui se délaie à l'eau pour faire des lavis. Il a remplacé le plomb dans les mines de crayons. Inutilisable avec les pastels car leur poudre n'y accroche pas, c'est pourquoi les pastellistes font leur dessin initial au fusain ou avec un crayon de pastel dont nous reparlerons. Il s'agit de carbone dont la cristallisation adopte la formation de plans clivables ce qui rend compte de sa propension à faciliter le glissement.
Noir de fumée ou de suie utilisé depuis toujours. Non recommandé par Madame Hidalgo qui, outre l'interdiction du feu de bois, domestiqué par homo erectus, il y a un million d'années, pourrait envisager de vider les musées parisiens.***
*** Information non contrôlée.
-- Les blancs
Blanc titane, dioxyde très stable, très blanc, très récent et déjà très utilisé. Profitez-en avant qu'il ne soit interdit pour un possible effet cancérigène.
Blanc de plomb ou céruse banni pour saturnisme après deux millénaires d'emploi intensif.
Blanc de zinc même combat.
Nous n'avons pas parlé de la craie sur laquelle nous reviendrons à la page "matériaux", de la pierre noire, un schiste qui avec la craie et la sanguine complétait la technique dite "aux trois crayons", du sépia employé en aquarelle, ni de la sanguine qui est plus une couleur qu'un pigment, composée de divers ocres, d'hématite naturelle, ses craies ont précédé les pastels dans les dessins préparatoires et fourni parfois de purs chefs-d'oeuvre.
A propos de trois crayons :