Arnaque artistique
Non, il n'est pas question ici du marché de l'art ... même si l'on y trouve de tout. Non, c'est du rapport de l'artiste à son ouvrage dont nous allons parler.
L'oeuvre d'art, nous avons déjà eu l'occasion de le dire sur ce site, est doublement créée. Créée par l'auteur, puis recréée par celui qui la regarde, l'écoute ou la touche. Oui, c'est parce qu'elle le touche qu'il parle d'art et que l'auteur devient Artiste. Les créateurs qui ne trouvent pas leur public, qui restent incompris, outre la déception et la "vache enragée", abandonnent ou espèrent, c'est affaire de tempérament; au moins savent-ils ce qu'ils ont voulu exprimer. Plus que le talent c'est peut-être la manière, le style, le genre qui n'était pas dans le vent de leur époque.
Sous l'ancien régime, la formation du peintre était assurée par les maîtres dûment installés, ensuite, ayant été reconnu apte, il ne pouvait exercer son art qu'avec leur autorisation, sous la surveillance de la jurande qui surveillait étroitement le commerce de l'art. Il n'y avait pas de place pour les fantaisies.
A partir du dix-neuvième siècle, libérés de ce carcan, la peinture explore de nouveaux domaines. Le peintre ne doit plus remplir un cahier des charges,
il doit plaire et accessoirement être compris; l'échec est possible, indépendamment du talent. Les exemples abondent de reconnaissance tardive, souvent trop tardive, pensez à Van Gogh. L'oeuvre était là, en attente. Bien sûr les créateurs géniaux et reconnus comme tels vont générer une émulation, d'autres artistes, sans copier, s'inscriront dans leur suite. Nous parlons alors d'école, c'est le bon terreau de la bonne peinture.
Mais celui qui, doué ou pas, talent ou pas, travail ou pas, perçoit ce qu'attendent les critiques, qui écoute les galeristes lui parler de "ce qui se vend" et qui, fort d'un premier succès qui peut avoir été justifié, se consacre, consacre son talent et son savoir faire à des oeuvres bâclées devant lesquelles la multitude des suiveurs va s'extasier en bêlant d'admiration, voilà l'arnaque dont nous parlons ! N'a-t-on pas vu, au vingtième siècle un des plus grands finir sa vie en gribouillant des assiettes et des pots, sûr de trouver des acquéreurs reconnaissants de s'être fait rouler.
Constater que l'argent pourrit ce qu'il touche ne mériterait pas une page dans un site-web s'il s'agissait de sport ou de politique, mais nous parlons
de ce qui fait la grandeur de l'homme. Un seul artiste justifie l'existence de toute une "humanité" de besogneux qui cessent d'être des petits en
s'élevant à percevoir cette grandeur.
Voilà pourquoi nous sommes fondés à mépriser les artistes-escrocs, les familles héritières qui en vivent et le "marché" qui continue à encenser
n'importe quoi. Par opposition nous pourrions presque comprendre et pardonner les faussaires, ils auraient tort de se priver et ne récoltent-ils la manne
qu'au prix d'un vrai travail.
Et félicitations à vous d'avoir trouvé ce billet d'humeur avec lequel vous pouvez être en désaccord.
Daniel Saunier